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Cah. Agric.
Volume 33, 2024
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Article Number | 4 | |
Number of page(s) | 8 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/cagri/2023028 | |
Published online | 06 February 2024 |
Article d’opinion / Opinion Article
Nourrir sans détruire avec des systèmes alimentaires territorialisés durables : le cas de l’espace Afrique-Europe
Feeding without destroying with sustainable territorialized food systems: the case of the Africa-Europe region
1
Institut agro, Montpellier, France
2
Ancien ministre de l’Agriculture, membre de l’Académie nationale des sciences et technologies, Dakar, Sénégal
* Auteur de correspondance : jean-louis.rastoin@supagro.fr
Après quatre transitions technologiques et organisationnelles en 400 000 ans, l’humanité est en quête d’une sécurité alimentaire durable et partagée. En effet, les lourdes externalités négatives du système agro-industriel devenu hégémonique en 150 ans incitent à reconstruire les systèmes alimentaires dans une perspective socio-écologique. Sur la base d’une synthèse de diverses prospectives, les auteurs présentent le scénario alternatif de « systèmes alimentaires territorialisés durables » (SATD) fondés sur la qualité élargie des produits, l’autonomie territoriale, la proximité et la solidarité. Un tel scénario induirait de profonds changements dans les pays du Nord et du Sud, avec des trajectoires contextualisées. Pour l’Europe, il s’agit d’une rupture de tendance. En Afrique, la faible prégnance du modèle agro-industriel suggère une orientation directe vers des SATD, sans passer par ce modèle agro-industriel. À partir de considérations théoriques et empiriques, quatre préconisations sont faites à l’intention des décideurs publics et privés : planification stratégique, prévention des risques par le concept « une seule santé », redéploiement de la chaîne des savoirs, reconfiguration des filières agro-alimentaires et de leurs modes de gouvernance.
Abstract
After four technological and organizational transitions in 400,000 years, humanity is in search of sustainable and shared food security. Indeed, the heavy negative externalities of the agro-industrial system that has become hegemonic in 150 years encourage us to rebuild food systems from a socio-ecological point of view. Based on a synthesis of different forecasts, the authors present the alternative scenario of “Sustainable Territorialized Food Systems” (STFS) based on the extended quality of products, territorial autonomy, proximity and solidarity. Such a scenario would induce profound changes in the countries of the North and the South with contextualized trajectories. In Europe, this is a trend break. In Africa, the weak significance of the agro-industrial model suggests a direct orientation towards STFSs, without going through this agro-industrial model. Based on theoretical and empirical considerations, four recommendations are made for public and private decision makers: strategic planning, risk prevention through the “One Health” concept, redeployment of the knowledge chain, reconfiguration of agri-food value chains and governance design.
Mots clés : systèmes alimentaires / sécurité alimentaire / prospective / développement durable / politiques publiques
Key words: food systems / food security / forecasting / sustainable development / public policies
© J.-L. Rastoin et P.A. Seck, Hosted by EDP Sciences 2024
This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License CC-BY-NC (https://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, except for commercial purposes, provided the original work is properly cited.
Cet article pose la question de la trajectoire future de nos systèmes alimentaires. À partir de la littérature scientifique et de l’expertise, il recommande une transition du scénario tendanciel de généralisation du modèle agro-industriel vers une configuration conforme au triple objectif – social, écologique et économique – d’un développement durable, défini en 1992 lors du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro. Une telle transition suppose de quitter la route de la servitude tracée – tant pour les consommateurs que pour les producteurs – par les externalités négatives du système alimentaire dominant en ce début des années 2020. Notre propos se fonde sur deux arguments. D’une part, le chemin de la durabilité de notre alimentation ne peut s’inscrire dans une adaptation – forcément marginale – du modèle agro-industriel pour les pays dans lesquels il est aujourd’hui hégémonique (pays à haut revenu et pays émergents) ou un passage obligé par ce modèle dans les pays à faible revenu où il n’est encore que très faiblement présent : la linéarité et le mimétisme ne constituent pas une fatalité. D’autre part, et contrairement à ce que recommandait Friedrich Hayek (1944) dans son célèbre ouvrage « The road of Serfdom », ce n’est pas par un élargissement de la gouvernance par les marchés, mais par sa transformation en une gouvernance par les communs, pour aller vers un mieux-être alimentaire individuel et collectif que l’on progressera vers une plus grande sécurité alimentaire. Les conférences des parties (COP) tenues sous l’égide de l’Organisation des Nations unies (ONU) en 2022, COP27 à Charm-El-Cheik sur le climat et COP15 à Montréal sur la biodiversité, sont venues – dans un contexte de crise polysémique amplifiée par la pandémie Covid-19 et la guerre en Ukraine – confirmer l’urgence d’un changement de cap et la nature des freins à sa mise en œuvre.
Pour traiter ces sujets, nous utiliserons le concept de système alimentaire défini par Louis Malassis, fondateur de l’école francophone d’économie agroalimentaire, comme « la façon dont les Hommes s’organisent, dans l’espace et dans le temps, pour obtenir et consommer leur nourriture » (Malassis, 1994). Un système alimentaire est formé par un ensemble d’acteurs interdépendants depuis la production de semences végétales et animales jusqu’à l’assiette ou le verre du consommateur. Dans la majorité des pays de notre planète, le système alimentaire se situe au premier rang en termes d’activité économique et d’emploi.
Une première partie sera consacrée à un rapide historique des systèmes alimentaires, à leur configuration actuelle et à un état des lieux des disponibilités en nourriture sur les différents continents. Dans un deuxième temps, nous présenterons un scénario possible répondant aux critères d’un développement durable : les systèmes alimentaires territorialisés durables (SATD). Nous examinerons dans une troisième partie, avec un focus sur l’Afrique, les défaillances des politiques agricoles et alimentaires contemporaines. Une dernière partie analysera les spécificités des systèmes alimentaires dans l’espace euro-africain et une possible convergence contextualisée en mobilisant le concept de SATD. En conclusion, nous traiterons de la nécessité et de l’urgence d’une transition vers une alimentation durable adaptée à chaque territoire.
1 L’humanité a vécu quatre transitions alimentaires sans parvenir à une sécurité durable et partagée
Depuis l’apparition de notre ancêtre l’Homo sapiens il y a environ 400 000 ans, on identifie quatre modifications en profondeur de notre alimentation appelées « transitions alimentaires ». La première transition date de 300 000 ans avec le passage du cru au cuit par l’utilisation du feu à des fins culinaires. La seconde résulte de la domestication de certaines espèces animales et végétales lors de la révolution agricole du Néolithique. La troisième est marquée par la division du travail entre agriculteurs, artisans et commerçants, il y a 5 ou 6000 ans. La quatrième transition alimentaire a débuté il y a environ 150 ans en Amérique du Nord et 70 ans en Europe, avec la création de systèmes alimentaires agro-industriels. Aujourd’hui, nous nous trouvons probablement à l’aube de la cinquième transition alimentaire qui devrait être caractérisée par le passage à des systèmes alimentaires territorialisés durables (Rastoin, 2020).
Le modèle agro-industriel présente cinq caractéristiques :
Une utilisation intensive de produits chimiques de synthèse, de biotechnologies, d’énergies fossiles ;
Une concentration et une spécialisation des entreprises agricoles, de l’industrie et du commerce alimentaire ;
Une artificialisation des produits par l’ultra-transformation industrielle et l’intensité du marketing ;
Une globalisation des marchés ;
Une financiarisation de la gouvernance publique et privée (IPES-Food, 2023).
Le système alimentaire agro-industriel, grâce à une productivité élevée, a permis d’accompagner une croissance démographique exponentielle (un milliard d’habitants en 1800, huit milliards en 2022), contrairement à ce que Malthus (1798) et Ehrlich (1968) avaient prophétisé.
Cependant, le système agro-industriel génère des impacts négatifs dans plusieurs domaines :
La santé humaine avec la forte hausse de l’obésité et des maladies chroniques d’origine alimentaire qui frappent environ 30 % de la population mondiale (Duru, 2021) ;
L’environnement, avec la dégradation des sols et la pollution des eaux, la perte de biodiversité, l’accélération du changement climatique (Crippa et al., 2021) ;
La destruction d’emplois dans les exploitations agricoles familiales et les petites et moyennes entreprises (PME) agro-alimentaires et le partage inégal de la valeur dans les filières : moins de 10 % du prix payé par le consommateur de produits alimentaires revient à l’agriculteur (Boyer, 2021) ;
La progression de la précarité alimentaire du fait du creusement des inégalités socio-économiques ;
Un modèle de consommation marqué par le gaspillage : en Europe, trente pour cent de la nourriture achetée serait jetée (UNEP, 2021).
De tels systèmes ont connu une croissance rapide du fait de l’industrialisation des économies des pays à haut revenu, puis des pays émergents, et sous la pression de l’urbanisation dans tous les pays de notre planète. Les systèmes de type agro-industriel approvisionnent en 2022 environ la moitié de la population mondiale, soit 4 milliards d’habitants. Dans les pays à faible revenu, c’est l’autosubsistance et la sous-alimentation qui prédominent en milieu rural, avec des filières d’approvisionnement des villes comportant de nombreux intermédiaires en économie informelle, conduisant à des trappes de pauvreté de grande ampleur (Development Initiatives, 2022).
Pourtant, la disponibilité moyenne des produits alimentaires au niveau mondial est supérieure aux normes nutritionnelles. C’est la répartition très inégale de la nourriture entre continents et entre pays qui pose problème comme on le constate dans le tableau 1, mais aussi à l’intérieur de chaque pays comme le montrent les statistiques nationales.
En prenant pour indice 100 la moyenne mondiale de 3 indicateurs nutritionnels définis dans les bilans alimentaires de la FAO, l’année 2019 se situe à 86 en Afrique sub-saharienne (sous-continent le moins bien doté) pour la disponibilité énergétique, 74 pour la disponibilité en protéines, 67 pour la disponibilité en matières grasses et respectivement 129, 137 et 202 pour l’Amérique du Nord (sous-continent le mieux pourvu), soit des écarts sur la valeur absolue des indicateurs de 53 %, 84 % et 203 %. Dans le cas de l’Afrique sub-saharienne, il y a déficit nutritionnel et dans celui de l’Amérique du Nord, excès. Au sein de chaque pays, on peut également observer des inégalités nutritionnelles importantes liées à des paramètres socio-économiques. Une situation choquante pour l’humanité en termes de santé publique et d’équité.
Ces considérations ajoutées aux externalités négatives du système alimentaire agro-industriel mentionnées plus haut ont suscité dans la communauté scientifique et dans la société civile des propositions de modèles alternatifs que l’on peut regrouper sous l’appellation de « systèmes alimentaires territorialisés durables » – SATD (Rastoin, 2015 ; Garçon et al., 2017 : Moragues-Faus et al., 2020 ; Rochefort et al., 2021 ; Gasselin et al., 2021). La préoccupation d’une alimentation durable était déjà présente dans les travaux des fondateurs de l’agriculture biologique à la fin du XIXe siècle. Elle est formalisée au Sommet mondial de l’alimentation de la FAO à Rome en 1996 et a pris de l’ampleur lors des travaux préparatoires du Sommet des Nations unies sur l’alimentation durable (UNFSS) de 2021. L’association RESOLIS basée à Paris a créé un observatoire des initiatives pour une alimentation responsable et durable qui décrit près de 1200 projets actifs en France et dans le monde. Ces projets, à l’échelle principalement des communes en France ou des municipalités à l’étranger, sont susceptibles de constituer les briques de futurs SATD dont elles partagent les valeurs.
Une répartition très inégale des disponibilités alimentaires dans le monde, 2019.
A very unequal distribution of food availability in the world, 2019.
2 Le scénario SATD s’inscrit dans un changement de paradigme
Alors que le modèle agro-industriel ne considère que la valeur marchande des biens alimentaires, les SATD ont pour objectif une triple performance : sociale (sécurité alimentaire pour tous), environnementale (préservation des ressources naturelles) et économique (rentabilité et capacité d’investissement des entreprises). Dans le scénario SATD, le changement est mis en œuvre selon quatre principes interdépendants : la qualité des produits, l’autonomie, la proximité et la solidarité, dans une stratégie de sécurité alimentaire durable. Ces quatre principes supposent le choix d’une échelle géographique les acceptant et induisent des systèmes alimentaires contextualisés et donc d’une grande variété, contrairement au modèle agro-industriel standardisé et globalisé.
La qualité « complète » intègre les composantes nutritionnelles, sensorielles et culturelles des produits alimentaires. La diète méditerranéenne – inscrite au « Patrimoine culturel immatériel de l’Humanité » – par l’UNESCO, en 2013 est un bon exemple de qualité totale de l’alimentation. Cette diète se caractérise en effet par la composition et la variété de ses plats, sa frugalité, sa commensalité et sa convivialité. Plus généralement, on peut faire l’hypothèse que les diètes alimentaires traditionnelles issues d’apprentissages sur plusieurs milliers d’années se révèlent mieux adaptées aux ressources naturelles et au profil des consommateurs locaux du fait de leur territorialisation. À cet égard, la diète correspond à un bien patrimonial (Bessiere et Tibère, 2011). Ce premier pilier des SATD permet de rompre avec la servitude engendrée par les produits alimentaires ultra-transformés par une industrialisation de masse.
L’autonomie correspond à un objectif d’accroissement de l’autosuffisance alimentaire par la production du territoire considéré (Rouillé d’Orfeuil, 2018) et rejoint l’ambition de souveraineté alimentaire qui ne peut s’exercer que dans un cadre national. Le dispositif des indications géographiques (IG) de l’Union européenne est un outil puissant pour favoriser l’ancrage territorial des systèmes alimentaires, avec 1606 IG (hors vins et spiritueux) enregistrées fin 2022, soit un doublement depuis 2009. L’autonomie contribue à l’atténuation du changement climatique en réduisant le carbone importé (Vetu et al., 2023). Ce deuxième fondement des SATD s’inscrit en rupture avec la servitude provoquée par la mondialisation et l’uniformisation des marchés.
La souveraineté alimentaire ne signifie pas protectionnisme sans discernement. Les échanges de produits alimentaires entre régions d’un territoire national et entre pays seront toujours nécessaires et souhaitables d’un point de vue nutritionnel, économique et social. Ces échanges doivent répondre aux critères du développement durable.
Les SATD mettent en action une triple proximité. La première proximité s’établit entre productions agricoles végétales, animales et la forêt dans le cadre d’un écosystème local, la diversification des espèces cultivées et élevées contribuant à la résilience de l’agro-éco-système et à la réduction des intrants (Poux et Aubert, 2018). La deuxième proximité se situe entre matières premières (exploitations agricoles) et transformation agro-alimentaire (artisanat et PME) par la formation de réseaux contractuels, favorables au partage de la valeur et à l’innovation. La troisième proximité rapproche producteurs et consommateurs par des circuits courts de commercialisation (un seul intermédiaire) et l’éco-tourisme, y compris à l’international. Ce troisième principe des SATD constitue une alternative à la servitude résultant de l’hégémonie des méga-firmes de l’agro-industrie et des technologies basées sur le carbone fossile.
La solidarité se traduit par des statuts d’entreprise intégrant la responsabilité sociale et environnementale, des formes coopératives d’organisation des filières et une mutualisation des ressources privilégiant la contractualisation entre acteurs. Transparence et éthique sont deux dimensions importantes des solidarités dans les SATD. La construction de SATD implique des politiques volontaristes considérant l’alimentation comme un « bien commun » devant être régulé par une gouvernance partenariale incluant les différents acteurs des systèmes alimentaires. Ce quatrième principe conduit à une émancipation de la servitude créée par l’asymétrie des pouvoirs entre acteurs des systèmes alimentaires.
L’échelle géographique (et donc de gouvernance) des SATD sera déterminée par plusieurs critères : 1) la production d’un panier de biens variés du point de vue nutritionnel ; 2) par des agro-éco-systèmes réunissant les différents opérateurs de la production-transformation-commercialisation des aliments ; 3) dans le cadre d’une circonscription administrative dotée d’une taille suffisante en ressources humaines et budgétaires. Les collectivités territoriales de base (communes, cantons, départements en France) ne peuvent satisfaire à ces trois critères. Les 19 régions françaises constituent donc l’échelle infranationale pertinente pour construire des SATD, de même les provinces en Espagne ou en Italie, les Länder en Allemagne. Cette échelle devrait évidemment s’insérer dans un niveau national, pluri-national (cas de l’Union européenne) et inter-gouvernemental, tous trois dotés de la capacité à légiférer et/ou à produire des institutions et des conventions. L’objectif de sécurité alimentaire durable suppose une coordination entre ces quatre échelles de gouvernance (Rastoin, 2022).
Un panorama de la situation de l’agriculture et de l’alimentation en Afrique permet de préciser les freins et les leviers caractérisant la cinquième transition alimentaire et son vecteur potentiel, les SATD.
3 En Afrique, comme dans de nombreux pays, des politiques agricole et alimentaire à la peine pour relever les défis d’un développement rural durable
Le continent africain dispose de vastes ressources foncières. Cependant, 65 % de terres arables sont dégradées (FAO, 2016). L’Afrique n’utilise que 4 % de ses ressources en eau renouvelables. Elle est dotée d’une grande biodiversité, avec une population majoritairement jeune et, de ce fait, d’un large potentiel d’innovation pouvant s’appuyer sur un important patrimoine de savoirs tacites. Malgré ses atouts, l’Afrique, seul continent importateur net de produits agricoles, est durement touchée par l’insécurité alimentaire (Resnick et al., 2020).
Les limites des politiques agricole et alimentaire africaines avérées par les évaluations conduites chaque année par la FAO et l’International Food Policy Research Institute (IFPRI) (Bjornlund et al., 2022) sont à rechercher dans les éléments suivants :
Une posture de gestion des urgences en l’absence de démarche prospective « Voir loin, voir large, analyser en profondeur, oser prendre des risques et penser à l’Homme » (Berger, 1959). En Afrique comme ailleurs, les problèmes de l’agriculture se situent selon nos estimations pour 1/3 dans les champs et 2/3 en dehors. Il est par conséquent indispensable de raisonner sur la base des systèmes alimentaires intégrant l’ensemble des parties prenantes, publiques et privées ;
Une approche productiviste de l’agriculture, sans pilotage par l’aval. L’augmentation de la production agricole africaine n’est pas une condition nécessaire et suffisante pour atténuer l’insécurité alimentaire et diminuer les importations. Ainsi, dans le secteur horticole, pour beaucoup de produits (par exemple les oignons), selon nos estimations à partir des bilans alimentaires de Faostat, l’offre domestique annuelle est supérieure aux besoins et pourtant on continue d’importer et les revenus ruraux baissent. Ceci s’explique par un décalage dans le temps et dans l’espace entre production et consommation qui pourrait être corrigé par une diversification des variétés utilisées, une réduction des pertes post-récolte et un ajustement des circuits commerciaux. Dans le secteur rizicole, on constate que, dans les pays africains ayant opté pour l’autosuffisance, la production est en hausse et les importations augmentent, par suite de défaillances dans les politiques agricoles ;
Des modes de gouvernance inadaptés. L’agriculture africaine se caractérise par une économie rurale administrée qui n’est pas adaptée au contexte régional et international. Il serait souhaitable qu’elle évolue vers une économie décentralisée, avec la mise en place d’un mode de gouvernance impliquant l’adhésion et l’engagement effectif de tous les acteurs dans des processus transparents d’établissement des priorités, de mutualisation des ressources humaines et matérielles, de prise de décision par subsidiarité et d’évaluation des impacts (Nubukpo, 2022). L’État pourrait être considéré comme un acteur parmi tant d’autres. Son rôle est de promouvoir le développement d’institutions stables et de mécanismes institutionnels efficaces ;
Une productivité de la terre insuffisante. En Afrique, selon les statistiques de la FAO, le niveau d’utilisation d’engrais minéral est le plus bas au monde avec en moyenne 29 kg/ha d’engrais en 2020 contre 145 kg/ha pour l’ensemble des pays. Il en résulte – associé à d’autres facteurs – de faibles rendements agricoles. L’accès aux engrais minéraux et organiques dans des conditions économiques favorables et s’inscrivant dans une dynamique de transition socio-écologique constitue l’un des défis de l’agriculture africaine (Jayne et Sanchez, 2021) (Tableau 2). En 2019, la productivité du travail en agriculture était 33 fois plus faible en Afrique subsaharienne que dans l’Union européenne, la productivité de la terre consacrée à l’agriculture et à l’élevage 8 fois moindre, tandis que la densité d’emplois pour 100 ha de terres arables, de cultures et de prairies permanentes était 4 fois plus élevée. Des gains de productivité sont donc indispensables dans la plupart des pays d’Afrique. Ces gains doivent être procurés par des itinéraires techniques prenant en compte les paramètres environnementaux ;
Un dispositif défaillant de recherche et de transfert de connaissances. On ne peut envisager une augmentation durable de la production agricole et alimentaire sans développement de technologies et de modes d’organisation adaptés aux milieux africains, dont la condition première est un dispositif de recherche performant. Selon l’Atlasocio, l’Afrique ne contribuait en 2018 que pour 3 % du total mondial des publications scientifiques. D’après l’Organisation des Nations unies pour la science, la culture et l’éducation (UNESCO), l’Afrique sub-saharienne ne comptait en 2018 que 98 chercheurs pour 1 million d’habitants contre 4789 l’Amérique du Nord, 3704 pour l’Europe et 1763 pour l’Asie de l’Est et du Sud-Est ;
Des freins à la diffusion des innovations techniques et organisationnelles : financements inadaptés pour la majorité des exploitations agricoles et des PME agro-alimentaires, lacunes des mécanismes de contrôle et de certification des intrants et des produits, insuffisance des infrastructures d’électrification rurale et de communication, carences de la législation foncière, formation professionnelle peu présente, etc. (Makate, 2019).
Estimation de 3 indicateurs de productivité agricole, 2019.
Estimation of 3 agricultural productivity indicators, 2019.
4 Au Nord comme au Sud, des points de convergence et des spécificités dans le diagnostic des systèmes alimentaires et les objectifs à atteindre
Le diagnostic des systèmes alimentaires conduit à observer plusieurs points communs entre les différents pays du monde, quel que soit leur positionnement géographique. Outre les externalités négatives en termes de santé publique et les dégradations environnementales mentionnées plus haut, on peut pointer les inégalités socio-économiques qui ne cessent de s’accroître (Laurent, 2020). Deuxièmement, des fractures territoriales entre zones rurales et zones urbaines selon des critères sociaux (démographie, infrastructures et services publics) et économiques (revenu par tête). Troisièmement et en complément des points précédents, un questionnement sur l’aménagement du territoire alors que le gisement constitué par l’emploi industriel et dans certains services disparaît du fait de la robotisation et des algorithmes.
L’intensité en emplois agricoles et induits est à raisonner en considérant l’ensemble de la population active. Vouloir appliquer aux pays à forte proportion de population rurale le taux de population active employée en agriculture serait faire preuve d’une dangereuse myopie prospective comme l’indique le tableau 3.
En 2020, la population active agricole mondiale telle que définie par le BIT s’élevait à près de 1,3 milliard de personnes, soit 36 % de la population active totale et une concentration sur deux continents : l’Asie (68 %) et l’Afrique (25 %). Notre esquisse prospective basée sur les séries chronologiques 1990–2020 du BIT adopte deux hypothèses normatives, la première d’un alignement sur la tendance observée dans les pays à haut revenu (scénario S1 dit « agro-industriel »), la seconde d’une rupture par rapport à cette tendance « au fil de l’eau » dans la période 2020–2050 (scénario S2 qualifié de « système alimentaire territorialisé durable », caractérisé par un changement des modèles de consommation et de production). Le scénario S1, avec un ratio de 5 % de population active agricole dans la population active totale en 2050 conduit à une disparition de plus d’un milliard d’emplois entre 2020 et 2050. Le scénario S2, avec un ratio de 20 %, prévoit un agrandissement modéré des exploitations agricoles tant au Sud qu’au Nord, notamment pour des raisons d’amélioration de leurs revenus. S2, avec une moindre substitution du capital au travail et des innovations fondées sur l’agroécologie, permet – en approchant une productivité comparable à celle de l’agriculture conventionnelle – de limiter la chute de l’emploi agricole à un peu plus de 400 millions de personnes, soit un écart de plus de 600 millions d’emplois par rapport à S1. À titre d’illustration, on peut mentionner la prospective sur la population active en France à l’horizon 2030 du Shift Project qui fait l’hypothèse, dans un scénario volontariste de transition agroécologique, de la création de 541 000 emplois par le système alimentaire, soit 47 % du total des emplois générés (Saleman, 2021).
Le scénario S2 constitue une transition vers une nouvelle configuration du système alimentaire dans les pays à forte présence du modèle agro-industriel et un saut d’étape – si l’on se réfère au schéma linéaire de Rostow (1960) devenu obsolète du fait de la conjonction de crises – dans les pays encore au stade de l’autosubsistance alimentaire, au motif que ce modèle se trouve aujourd’hui dans une impasse là où il est majoritaire (Solagro, 2016 ; Le Mouel et al., 2018).
Le diagnostic présenté ci-dessus sur le manque de vision prospective (court-termisme) et les incomplétudes des politiques agricoles et alimentaires en termes de pilotage des filières (par l’amont et non pas par l’aval), de mode de gouvernance (centralisé), de productivité (très faible) et de dispositifs d’innovation (peu efficaces) ainsi que les scénarios pour l’emploi agricole à l’horizon 2050 conduisent à proposer sept repères pour la transformation des systèmes alimentaires en Afrique dans une perspective de développement durable en construisant des SATD :
Un modèle agricole et alimentaire de portée universelle est une chimère. Ce sont les réalités de terrain qui doivent servir de boussole : un vêtement sur mesure est toujours mieux ajusté qu’un vêtement en prêt-à-porter. La prise en compte de l’hétérogénéité des milieux agro-climatiques et des écosphères, des systèmes de production, des habitudes de consommation, des cultures et des institutions est essentielle pour réussir une transition durable (Bricas et al., 2021) ;
La sécurité alimentaire et nutritionnelle est conditionnée par la souveraineté alimentaire. Une politique de souveraineté alimentaire est susceptible de reposer sur les éléments suivants : assurer une autosuffisance pour des produits de base en fortifiant le tissu agricole et industriel, minimiser graduellement les importations et améliorer la compétitivité au niveau international afin de dégager un excédent de la balance commerciale ;
Miser sur la qualité des produits et une bonne gestion de la production. Huit critères sont à privilégier : productivité des facteurs, qualité sanitaire et organoleptique des produits, diversification et étalement de la production dans le temps et dans l’espace, optimisation de l’usage des ressources naturelles, résilience aux changements climatiques. Il s’agit de préalables pour assurer la durabilité des capacités productives des écosystèmes et l’équilibre biologique de l’environnement, d’où la nécessité de promouvoir des approches agroécologiques fondées sur des preuves scientifiques ;
Le transfert de technologie n’est pas suffisant. Chaque pays, chaque continent, est à la fois et à des degrés divers producteur et utilisateur de connaissances et de technologies endogènes et exogènes. Par conséquent, il apparaît nécessaire de soutenir les systèmes nationaux de recherche agricole et alimentaire et de développer un partenariat avec les centres de recherche avancés, tout en se positionnant au niveau du Consultative Group on International Agricultural Research (CGIAR) et en tirant profit des acquis des académies d’agriculture et des sciences, nationales et régionales ;
Apporter un soutien aux petits exploitants agricoles et aux TPE et PME agro-alimentaires, aux femmes et aux jeunes. Dans ces catégories socio-économiques encore largement majoritaires en Afrique, il existe des marges de progrès importantes notamment dans deux domaines : l’appropriation des innovations technologiques et organisationnelles ; la distribution des facteurs de production subventionnés (engrais, semences, etc.) ;
Promouvoir une coopération équilibrée entre les exploitations agricoles familiales et les acteurs industriels et tertiaires des systèmes alimentaires. Des partenariats efficaces entre acteurs des systèmes alimentaires supposent un cadre institutionnel robuste portant notamment sur la sécurisation de l’investissement privé et le statut de la propriété foncière rurale. On peut suggérer que ce statut ne favorise pas un phénomène d’accaparement des terres, celles-ci restant la propriété de la collectivité et faisant l’objet, le cas échéant, d’accords contractuels d’usage avec les investisseurs ;
Mettre en place des infrastructures de base. Sans routes et pistes praticables ni réseaux d’électrification rurale et numériques, il n’est pas envisageable de diminuer significativement les pertes post-récoltes, de favoriser l’accès aux marchés, de réduire les coûts de transaction entre opérateurs et d’améliorer les revenus ruraux. Très souvent, il est plus judicieux de mieux protéger ce qui est produit que d’augmenter la production.
Prospective 2050 de la population active agricole mondiale.
2050 forecasting of the world agricultural active population.
5 Conclusion : repenser nos systèmes alimentaires
Dans un tel contexte mondial et régional, il apparaît indispensable de construire des systèmes alimentaires capables d’apporter des solutions aux lourds problèmes de l’insécurité alimentaire, des dégradations environnementales et des défaillances de marché (Schmitt et al., 2021).
Les considérations théoriques et les analyses empiriques amènent à formuler quatre préconisations pour accélérer la transition vers des systèmes alimentaires territorialisés durables, au Nord comme au Sud, à l’Est comme à l’Ouest (Académie d’Agriculture de France, 2019) :
Définir un cadre stratégique et planifier les actions par une politique alimentaire volontariste. Le Pacte régional pour une alimentation durable en Occitanie (France) 2019–2023 (Occitanie, 2019) constitue une esquisse de ce qui pourrait devenir un plan stratégique alimentaire territorial. De nombreuses initiatives de ce type sont observables à travers le monde. On peut mentionner les Conseils de politiques alimentaires (Food Policy Councils) à l’œuvre dans les territoires de plusieurs pays, en Europe comme en Afrique, mais qui trouvent leurs limites dans une approche géographique et sectorielle souvent insuffisante ;
Ainsi, dans les actions à mener, privilégier d’une part la prévention des risques, source d’économies budgétaires et de résilience en appliquant le concept « Une seule santé : humaine, animale et environnementale » (FAO et al., 2022), au nom du principe « mieux vaut prévenir que guérir » énoncé par Hippocrate, voilà 2500 ans. D’autre part, prendre simultanément en considération l’élimination de la précarité alimentaire au nom du Droit à l’alimentation inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1947. Il s’agit, selon l’expression du chef cuisinier Olivier Roellinger, de « réduire la fracture alimentaire » (Roellinger, 2019). Enfin, mettre en avant le principe de sobriété pour le modèle de consommation et de triple performance pour les entreprises (cf. ci-dessous), ce qui rejoint les fondements des SATD ;
Repenser la chaîne des savoirs (recherche-développement, expérimentation et formation) par la multidisciplinarité et l’intégration des apports des savoir-faire traditionnels particulièrement riches dans les pays méditerranéens et d’Afrique. L’un des défis majeurs de la transition agroécologique réside dans l’augmentation des rendements partout où ils sont insuffisants pour nourrir correctement la population ;
Reconfigurer le modèle entrepreneurial :
En renouvelant la gouvernance des entreprises par une intégration de leurs responsabilités sociétales dans leurs statuts ;
En prenant en compte le coût des externalités négatives dans les « chaînes de valeur » pour en corriger les effets ;
En diversifiant les activités des exploitations agricoles pour en faire des entreprises de bio-économie circulaire produisant des aliments, de l’énergie, des molécules pour l’industrie et des services tels que le l’éco-tourisme. Par exemple, les fermes Songhaï au Bénin et en Afrique de l’Ouest, la ferme de Figeac en France avec des formes similaires en Europe, constituent des prototypes d’entreprises rurales diversifiées du futur, mais demandent à être mises en réseau à l’échelle de territoires plus vastes (régions, provinces) pour devenir structurantes et performantes dans la durée ;
En améliorant la compétitivité par :
○ La différenciation territoriale des produits (diètes locales) ;
○ La mutualisation des facteurs de production (capital, intrants, ressources humaines) ;
○ Un co-développement de la grande région Afrique-Méditerranée-Europe par une coopération décentralisée (principe de complémentarité et solidarité inter-territoriale).
Ces quatre leviers, activés par les SATD, constituent la base d’une transition socio-écologique des systèmes alimentaires, mais aussi d’une nouvelle dynamique territoriale de reconnexion entre l’espace rural et l’espace urbain. Cette ambition reste conditionnée par un consensus politique à l’écoute de la société civile.
Le philosophe et anthropologue Bruno Latour en faisait la recommandation en écrivant « Il faut faire coïncider la notion de territoire avec celle de subsistance » (Latour, 2012).
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Liste des tableaux
Une répartition très inégale des disponibilités alimentaires dans le monde, 2019.
A very unequal distribution of food availability in the world, 2019.
Estimation de 3 indicateurs de productivité agricole, 2019.
Estimation of 3 agricultural productivity indicators, 2019.
Prospective 2050 de la population active agricole mondiale.
2050 forecasting of the world agricultural active population.
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