Issue
Cah. Agric.
Volume 25, Number 6, Novembre-Décembre 2016
Innovation Platforms and Projects to support smallholder development - Experiences from sub-Saharan Africa. Coordonnateurs : Janice Jiggins, Jean-Yves Jamin
Article Number 64003
Number of page(s) 11
Section Synthèses / General Reviews
DOI https://doi.org/10.1051/cagri/2016050
Published online 23 December 2016

© B. Triomphe et al., Published by EDP Sciences 2016

Licence Creative CommonsThis is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License CC-BY-NC (http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, except for commercial purposes, provided the original work is properly cited.

1 Introduction

L’innovation n’est ni une panacée ni une fin en elle-même. Pourtant, lorsqu’elle réussit, elle peut contribuer au développement et permettre aux petits agriculteurs des pays du Sud de s’adapter aux changements mondiaux ou locaux qui touchent leur environnement et/ou d’en tirer parti.

De nombreux auteurs se sont efforcés ces dernières années de mieux comprendre ce qu’est l’innovation en tant que processus, et de concevoir des approches et interventions plus efficaces de recherche et développement (R&D) pour la développer, l’accompagner et la diffuser. Ont ainsi émergé le concept et les approches liés aux systèmes d’innovation agricole (Adekunle et al., 2012 ; Geels et Schot, 2007 ; Klerkx et Leeuwis, 2008 ; Klerkx et al., 2012 ; Schut et al., 2015 ; Touzard et al., 2014 ; World Bank, 2006, 2012). Selon ces auteurs, l’innovation résulte d’un processus interactif se déroulant au sein de réseaux hétérogènes de chercheurs, agriculteurs, entrepreneurs privés, organisations non gouvernementales (ONG), acteurs gouvernementaux et autres partenaires, et dans un environnement qui peut favoriser ou au contraire restreindre l’innovation (Hall et Clark, 2010). Les acteurs interagissent de manière non linéaire, itérative et souvent imprévisible pour atteindre des objectifs communs. Les produits de ces interactions incluent diverses innovations techniques, organisationnelles et institutionnelles mises au point sur de longues périodes (Hounkonnou et al., 2012).

Bien que les processus d’innovation en agriculture soient assez bien compris dans leurs aspects génériques, il existe encore peu d’études comparatives sur la manière dont ils se développent dans l’agriculture familiale en Afrique (voir cependant Adekunle et al., 2012 ; Sanyang et al., 2014). La littérature cite volontiers les difficultés spécifiques limitant l’innovation agricole en Afrique telles que le manque de capitaux, les faibles niveaux d’éducation formelle, le mauvais fonctionnement des marchés et la faiblesse des institutions (Hounkonnou et al., 2012 ; Struik et al., 2014). Elle cite aussi les opportunités permettant à l’innovation de se développer, comme les taux élevés de croissance, la richesse des ressources naturelles, le développement rapide des marchés, ou encore la créativité des acteurs locaux (Sanginga et al., 2009). Par ailleurs, il n’est pas clair s’il convient « d’orchestrer » (World Bank, 2006) l’innovation explicitement dans le cadre des nombreuses interventions de R&D pilotées et financées de l’extérieur, ou s’il pourrait être préférable de s’appuyer davantage sur les initiatives locales conduites, souvent de manière invisible, par de nombreux agriculteurs et autres acteurs locaux (Buckles et al., 1998 ; Chambers et Thrupp, 1994 ; Sanginga et al., 2009 ; van Veldhuizen et al., 1997 ; Waters-Bayer et al., 2015).

Le projet européen JOLISAA (Joint Learning in and about Innovation Systems in African Agriculture, www.jolisaa.net) a cherché à évaluer diverses expériences d’innovation agricole récentes menées au Bénin, au Kenya et en Afrique du Sud en s’inspirant du cadre SIA - systèmes d’innovation agricoles (Triomphe et al., 2013). L’équipe interinstitutionnelle et multi-disciplinaire JOLISAA s’est intéressée principalement aux questions suivantes :

  • Quelle est la nature de l’innovation (technique, organisationnelle, institutionnelle), comment évolue-t-elle sur la durée et quels en sont les effets ?

  • Quelles sont les différentes parties prenantes de l’innovation ; quel rôle jouent-elles dans le processus d’innovation, et quelles sont leurs contributions respectives ?

  • Quelles sont les conditions qui favorisent ou entravent l’innovation ?

Cet article présente les principaux résultats obtenus par l’équipe JOLISAA, sur la base de 13 études de cas menées selon un cadre analytique commun et une approche participative. L’article met l’accent sur trois aspects : la prise en compte du temps « long » de l’innovation et la complexification du récit d’innovation qui en résulte, une analyse critique du rôle des projets R&D dans les processus d’innovation, et une réflexion initiale sur l’innovation locale. Il conclut en proposant quelques recommandations sur le meilleur moyen d’évaluer et d’accompagner l’innovation, et insiste en particulier sur la prise en compte par les acteurs de la R&D publique des dynamiques locales d’innovation.

2 Approche utilisée pour l’évaluation des expériences d’innovation

L’évaluation a été organisée en cinq phases consécutives :

  • le développement d’un cadre analytique ;

  • l’inventaire des cas d’innovation ;

  • l’évaluation participative des cas ;

  • l’analyse transversale des cas ;

  • le développement d’enseignements et de recommandations d’ordre politique.

2.1 Cadre analytique

L’équipe JOLISAA a commencé par élaborer un cadre analytique commun permettant la description et l’évaluation homogènes des diverses expériences. Ce cadre comprend deux ensembles successifs de directives et instruments, l’un pour l’inventaire (Triomphe et al., 2013), et l’autre pour l’évaluation participative. Il s’inspire du concept des SIA (Hall et al., 2003 ; Touzard et al., 2014 ; World Bank, 2006, 2012) et s’intéresse surtout au type, à la nature et au domaine de l’innovation ; aux parties prenantes, à leurs rôles et leurs interactions ; aux déclencheurs et moteurs de l’innovation ; à l’histoire de l’innovation ; et aux résultats obtenus (Tab. 1).

Tableau 1

Cadre analytique inspiré du cadre SIA (Systèmes d’innovation agricole) utilisé pour l’évaluation des cas d’étude (version simplifiée).

Analytical framework inspired by the AIS framework (Agricultural Innovation Systems) used for case study assessment (simplified version).

2.2 Inventaire des expériences d’innovation

Les critères clés de sélection des cas d’innovation répertoriés étaient les suivants : (1) engagement actif des petits agriculteurs ; (2) un minimum de trois différents types d’acteurs impliqués ; et (3) processus ayant duré au moins trois ans et/ou ayant dépassé la phase des déclarations d’intention. La recherche et la description initiale des cas dans chaque pays s’est effectuée via diverses modalités : recherche documentaire, entretiens avec des personnes-ressources dans les réseaux R&D nationaux, connaissances propres des membres des équipes nationales JOLISAA ; recherche d’innovations dans une zone géographique donnée, visites de terrain (Triomphe et al., 2013). L’inventaire ainsi réalisé a favorisé les cas d’innovation orchestrée, c’est à dire ayant bénéficié de financements publics extérieurs, reflétant l’appartenance des équipes nationales JOLISAA au secteur de la R&D publique mais aussi le fait que l’innovation locale (que l’on peut définir dans le cadre de cet article comme toute innovation ou processus d’innovation, développé par des agriculteurs et d’autres acteurs du monde rural sans ou avec peu d’aide des acteurs publics et privés de la R&D formelle), était plus difficile à repérer.

2.3 Évaluation participative des cas

Parmi les 57 cas inventoriés dans les trois pays, l’équipe en a retenu 13 pour mener une évaluation participative qualitative mobilisant des membres des équipes JOLISAA, des étudiants et des partenaires locaux. Les 13 cas choisis (Tab. 2) représentaient les expériences les plus riches, les plus dynamiques au cours des années précédentes et les plus complémentaires entre elles au niveau d’un pays, et aussi celles où les partenaires-clés étaient preneurs d’une collaboration avec l’équipe JOLISAA. En sus des considérations thématiques liées au cadre analytique, l’évaluation a aussi débouché sur la formulation collective de recommandations visant à faire avancer le processus d’innovation.

Les méthodes employées comportaient un mélange d’entretiens semi-structurés collectifs et individuels, de focus groupes avec les principales parties prenantes, d’ateliers multi-acteurs de validation, d’observations directes et d’étude bibliographique (Triomphe et al., 2014).

Tableau 2

Liste des 13 cas d’étude ayant fait l’objet d’une évaluation participative dans le cadre du projet JOLISAA1.

List of the 13 case studies having been assessed in a participatory manner within the context of the JOLISAA project1.

2.4 Analyse transversale et formulation des recommandations

Une fois les évaluations terminées, et malgré certaines hétérogénéités dans la mise en œuvre de la méthode, des rapports individuels ont été élaborés selon une trame commune. Une analyse comparative de type qualitatif a été effectuée aux niveaux national et global sur la base de questions et variables communes formulées par l’équipe JOLISAA sur la base des résultats individuels effectivement atteints, et pour lesquelles étaient considérés les cas pertinents, en nombre variable selon la question traitée. L’analyse a surtout porté sur la nature des innovations et leur enchaînement au cours du temps, et sur le rôle des différents acteurs dans le processus d’innovation et la nature des liens qui se sont tissés entre eux. L’équipe JOLISAA a aussi élaboré, en parallèle à cette analyse, des enseignements et recommandations pour fournir des orientations générales sur les meilleurs moyens de soutenir l’innovation (Waters-Bayer et al., 2013).

3 Principaux résultats et discussion

Les 13 cas évalués couvrent une large diversité d’innovations sur divers plans : type (technique, organisationnel, institutionnel), domaine (cultures, élevage, pêcheries, transformation, commercialisation), échelle (locale, régionale, nationale) et durée (de quelques années à plusieurs décennies) (Tab. 3).

Dans leur ensemble, les résultats confirment ceux obtenus dans la littérature récente sur l’innovation en milieu rural (FAO, 2014 ; World Bank, 2012). Ainsi, pour ce qui est de la diversité des parties prenantes engagées dans l’innovation, il s’agissait, sauf exception, d’alliances plus ou moins formelles, fonctionnelles et larges entre acteurs, incluant selon les cas agriculteurs-innovateurs individuels, une ou plusieurs organisations paysannes, des chercheurs (pas toujours), des services de vulgarisation ou des ONG de développement, et (parfois) des entrepreneurs privés. Le plus souvent, tout ou partie de ces acteurs étaient mobilisés dans le cadre de projets R&D bénéficiant de financement externes. Les rôles respectifs joués par les uns et les autres et l’évolution de ces rôles dans le temps sont aussi assez conformes à ce que décrit la littérature. Enfin, nos résultats confirment la diversité existante des facteurs déclencheurs et moteurs de l’innovation (dégradation de l’environnement, changements dans l’environnement socioéconomique, forces de marché, changements des lois) ; ou encore les dimensions multiples de l’innovation qui ont été identifiées : technique, organisationnelle et institutionnelle (Tab. 3).

Certains résultats sont cependant plus rarement mis en avant et méritent une analyse plus approfondie : (1) le pas de temps pertinent pour bien apprécier la nature complexe des processus d’innovation ; (2) le rapport entre les processus d’innovation et les projets financés par des fonds extérieurs ; et (3) l’innovation locale.

Tableau 3

Caractéristiques clés de cas choisis d’innovation évalués en 2012 dans le cadre du projet JOLISAA en Afrique.

Key features of selected African innovation case studies assessed in 2012 within the framework of the JOLISAA project.

3.1 Bien comprendre un processus d’innovation requiert un pas de temps long

Dans la plupart des 13 cas étudiés, le pas de temps pertinent et nécessaire pour bien comprendre un processus d’innovation donné et ses itérations successives s’est étendu sur une voire plusieurs décennies. Le cas du soja au Bénin illustre bien cette situation (Floquet et al., 2015) : mise au point de recettes à base de soja pour améliorer l’alimentation infantile dans les années 70 avec l’aide d’ONG puis fabrication d’aliments pour bébés, substitution d’ingrédients dans des recettes de cuisine et développement de marchés locaux pour ces produits dans les années 1990-2000 sous le leadership de femmes transformatrices et entrepreneuses, développement entre les agriculteurs et les industriels de contrats de production de soja et diversification des utilisations du soja dans diverses filières au cours des dernières années.

Comme pour le cas soja, nombre de processus d’innovation étudiés ont traversé des phases successives au fil du temps, de durée variable, imbriquées les unes aux autres et centrées sur des problématiques et innovations particulières de nature technique (une nouvelle variété), organisationnelle (des agriculteurs acquérant collectivement des intrants ou vendant leurs produits) ou institutionnelle (transformation des règles existantes) (Fig. 1). Ces dimensions successives sont souvent une conséquence logique de l’effet et de la « réussite » des innovations développées dans une phase antérieure et de leurs implications : ainsi, au Kenya, le nouveau mode de gestion du Prosopis (un arbre invasif) a permis la production de charbon qui a alors pu être vendu sur les marchés après un changement dans les règles de mise sur le marché (Chengole et al., 2014b). Les innovations se développent par ailleurs sous l’influence de facteurs externes et internes eux-mêmes changeants : disponibilité de ressources, changements ou crises dans l’environnement externe, arrivée et départ d’individus et acteurs cruciaux, conflits, etc.

La prise en compte du temps long a rendu la plupart des récits d’innovation recueillis dans le cadre JOLISAA relativement complexes. Leur complexité découle aussi de la prise en compte des perceptions souvent contrastées des divers acteurs sur ce qu’a été le processus d’innovation, telles qu’elles ont émergé de l’évaluation participative. Cette complexité contraste fortement avec les récits simples, souvent linéaires, centrés typiquement sur un type d’innovation développée par un groupe d’acteurs réduits sur un pas de temps court, très liés à la mise en œuvre d’un projet R&D formel. Ces récits simples, les seuls généralement disponibles lors de l’inventaire initial JOLISAA (Triomphe et al., 2013), pouvaient parfois induire en erreur sur la nature réelle du processus d’innovation étudié, comme l’évaluation l’a révélé par la suite.

thumbnail Fig. 1

Séquençage des innovations techniques organisationnelles et institutionnelles dans le cas Prosopis sp. au Kenya.

Sequencing of technical, organisational and institutional innovation in the Prosopis sp. case in Kenya (Source : Chengole et al., 2014b).

3.2 L’innovation vs. les interventions R&D orchestrées de l’extérieur

La majorité des cas d’innovation étudiés (10 sur 13 des cas listés dans le Tab. 2 ; 5 sur 7 des cas présentés dans le Tab. 3) étaient étroitement liés à des projets ou interventions R&D financés de l’extérieur, une caractéristique peu surprenante dans un environnement socio-économique où les financements nationaux sont rares. Dans ces 10 cas, les organisations R&D ont joué un rôle de leader ou co-leader, particulièrement lors des phases initiales de l’innovation.

Sauf exception, ces interventions se sont déployées sur des périodes courtes (quelques années). Un de leur principaux intérêts a été de permettre l’accès à différentes ressources cognitives (nouvelles idées ou technologies, concepts et approches permettant d’apporter une solution à un problème local), humaines (experts thématiques, professionnels des organisations R&D et des gouvernements difficiles à mobiliser hors du cadre du projet) et financières (création d’infrastructure, mise à disposition d’équipements, achat d’intrants ou de production, financement de déplacements, réunions, etc.). Ils ont aussi assuré la formation et la mobilisation de différents acteurs locaux autour d’objectifs explicites et selon des approches participatives bien structurées, en jouant un rôle essentiel pour catalyser et faciliter les interactions.

Cependant, ces interventions ne répondaient pas toujours clairement à une demande, une initiative en cours ou un besoin avéré des acteurs locaux : ainsi, dans le cas de l’aloès au Kenya, l’intervention est née surtout en réponse à l’entrée du pays dans la CITES (Convention on International Trade in Endangered Species of Wild Fauna and Flora) (Chengole et al., 2014a). Par ailleurs, elles proposaient une vision assez étroite de l’innovation à développer : souvent centrée sur un seul aspect (par exemple, gestion de la fertilité des sols, chaulage, captage de l’eau, achat collectif d’intrants) et peinaient à prendre en compte les autres dimensions nécessaires de l’innovation, considérées plutôt comme relevant de la « mécanique » de mise en œuvre du projet, plutôt que comme des innovations de plein droit : c’est typiquement le cas pour le sorgho de brasserie au Kenya, pour lequel les groupes de producteurs mis en place pour l’intervention servaient à produire et collecter le sorgho « en quantité suffisante ».

Enfin, à l’exception du cas du riz étuvé au Bénin (Floquet et al., 2015), les interventions analysées ne semblent pas avoir réussi à institutionnaliser l’innovation au terme de l’intervention comme elles l’avaient envisagé au départ (Tab. 4). Cet échec peut avoir diverses raisons : durées trop courtes, non prise en compte de la dynamique locale d’innovation (cas de l’aloès au Kenya), mauvaise lecture de la demande et des contraintes locales (cas du sorgho de brasserie au Kenya), problèmes de mise en œuvre (tensions et conflits entre les parties prenantes), insuffisance du renforcement des capacités des acteurs locaux, etc.

Tableau 4

Modalités et influence des interventions R&D sur le processus d’innovation dans différents cas d’étude JOLISAA.

Modalities and influence of external R&D interventions on the innovation process of selected JOLISAA case studies.

3.3 Des processus locaux d’innovation pouvant être dynamiques et performants

Malgré l’influence notable des interventions externes dans la plupart des cas étudiés, quelques études de cas révèlent l’importance des dynamiques d’innovation locales. Ainsi pour le Bénin (cas des systèmes agro-aquatiques hwedos et du soja : voir Tab. 3), Floquet et al. (2015) ont montré l’importance des innovations souvent techniques, mais aussi organisationnelles ou dans le domaine de la transformation et de la commercialisation mises en place progressivement par les acteurs locaux en réponse à un environnement en évolution et cela presque sans appui extérieur. Dans le cas du soja, l’innovation semble d’ailleurs s’être accélérée et diversifiée une fois l’intervention initiale terminée, peut-être parce qu’elle a répondu à un fort besoin des consommateurs locaux. Dans le cas de l’aloès au Kenya (Chengole et al., 2014a), la dynamique locale préexistante à l’intervention R&D avait produit plusieurs innovations, tant techniques que dans le domaine de la commercialisation, adaptées aux conditions de la zone, que l’intervention R&D postérieure a peu, voire pas, su ou voulu prendre en considération.

L’existence de telles dynamiques et de résultats positifs ne veut pas dire que tout va pour le mieux sans intervention externe : ainsi, dans le cas de l’aloès, les risques de surexploitation d’une espèce menacée existaient bel et bien, et les commerçants locaux semblaient poursuivre une stratégie plutôt minière. Dans le cas des hwedos, les organisations R&D semblaient capables de renforcer leur productivité via différentes innovations techniques peu connues des acteurs locaux.

La question se pose donc de savoir comment ces deux modèles d’innovation (orchestrée ou locale) peuvent interagir et se renforcer mutuellement, plutôt que s’ignorer.

4 Discussion

Les résultats exposés ci-dessus ouvrent la porte à une série d’interrogations génériques sur la façon dont l’innovation peut être documentée et évaluée, sur la manière dont elle se déroule et peut être (mieux) accompagnée, en particulier en ce qui concerne la prise en compte des dynamiques d’innovation locale.

4.1 Des défis significatifs à une évaluation systémique compréhensive des processus d’innovation

Comme d’autres (FAO, 2014 ; Pyburn et Woodhill, 2011 ; Spielman et al., 2009 ; World Bank, 2006, 2012), l’équipe JOLISAA a trouvé le cadre analytique des SIA, même dans une version simplifiée, très utile pour comprendre de manière qualitative les processus d’innovation, et en particulier le rôle de différents acteurs et leurs interactions ou celui de l’environnement externe. Ces aspects n’avaient été que peu, voire pas, examinés dans la documentation pré-existante sur les cas étudiés.

Néanmoins, partager et appliquer un cadre analytique inspiré du concept SIA et des méthodes qualitatives participatives basées sur un tel concept pour évaluer des processus d’innovation reste délicat. En effet, la communauté R&D à laquelle l’équipe JOLISAA appartient elle aussi, apparaît encore peu préparée et ouverte aux approches systèmes de type qualitatif et à l’analyse de l’innovation vue en tant que processus, notion qui reste mystérieuse, voire confuse, pour beaucoup de ses membres (TAP, 2015). Peut-être en partie parce que cette communauté possède des notions limitées en sciences sociales, et maîtrise souvent mal des outils de base pourtant nécessaires à toute évaluation participative systémique, tels que la facilitation d’ateliers multi-acteurs ou de focus groupes, ou la conception et la réalisation d’entretiens compréhensifs de type semi-directif (Triomphe et al., 2015). Elle peine aussi à reconnaître et à prendre en compte la multiplicité et la légitimité des points de vue des divers acteurs engagés dans l’innovation ou concernés par celle-ci, se contentant souvent de prendre pour argent comptant le discours des professionnels de la R&D publique sur leurs activités.

Une telle situation est probablement aussi en partie un des effets de l’affaiblissement prolongé des systèmes de recherche et de vulgarisation publiques en Afrique (Sumberg, 2005), et aussi du départ à la retraite non-compensé de la génération qui s’était engagée dans les approches de type « systèmes de production » au cours des années 1980 et 1990. Elle reflète également le fait que la communauté internationale de la R&D agricole, très présente en Afrique, est elle-même très focalisée sur l’innovation technique, sa mise au point et sa diffusion selon des modèles linéaires somme toute conventionnels, comme le montre l’évolution récente du GCRAI (Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale) et en particulier la refonte des CRP (CGIAR Research Programs).

4.2 Comment mieux accompagner l’innovation en Afrique ?

Les résultats obtenus dans le cadre du projet JOLISAA confirment globalement ce que décrit la littérature SIA sur la nature des processus d’innovation, et justifient pleinement l’intérêt et la nécessité de prendre en compte la multiplicité des acteurs, les différentes dimensions de l’innovation, et l’environnement dans lequel l’innovation se développe ou encore le pas de temps long.

Mais ils posent aussi la question des modalités les plus appropriées pour fomenter et soutenir l’innovation si sa nature est bien telle que la littérature SIA ou nos résultats la décrivent. Comme le montrent Geels et Schot (2007), et si nous assimilons le rôle des interventions externes à la création de niches d’innovation temporaires protégées, il s’agirait donc de favoriser au maximum la possibilité que ces niches puissent atteindre le stade du régime d’innovation, plutôt que d’avorter souvent brutalement une fois l’intervention externe terminée, faute en particulier d’un environnement porteur favorable.

Pour ce faire, il faudrait probablement modifier en profondeur certaines des modalités les plus courantes des interventions de la R&D publique : augmenter leur pas de temps (ce qui impliquerait de faire évoluer la culture pernicieuse de l’appel d’offre comme modalité principale de financement), considérer l’innovation dans ses différentes dimensions, utiliser le cadre logique pour favoriser l’apprentissage (Arkesteijn et al., 2015), adopter des postures et des approches de type recherche-action ou co-innovation (Dogliotti et al., 2014 ; Faure et al., 2010). Il faudrait aussi éviter les prises d’initiative intempestives des acteurs conventionnels de la R&D trop prompts peut-être à répondre à des effets de mode internationaux reflétés dans les priorités changeantes des bailleurs de fonds (Triomphe et al., 2014).

Il pourrait aussi s’avérer pertinent de donner plus de pouvoir aux acteurs locaux sur les priorités en termes d’innovation, sur l’utilisation des ressources financières ou sur le choix des approches (Waters-Bayer et al., 2015), même s’il ne faut pas surestimer la capacité des acteurs locaux à s’engager dans des processus parfois très chronophages (Tripp, 2009). Enfin, il s’agirait d’assurer un équilibre plus satisfaisant entre production académique ou technique, accompagnement flexible et dans la durée du « chemin d’impact » (Douthwaite et al., 2003), renforcement des capacités d’innovation (Leeuwis et al., 2014) et impact effectif en termes de développement, ce qui implique de rendre l’environnement plus favorable à l’innovation (Sulaiman et al., 2011).

4.3 Reconnaître, favoriser et renforcer l’innovation locale

La question du lien entre innovation orchestrée et innovation locale se pose. Plusieurs de nos études de cas ont confirmé que de nombreux petits agriculteurs innovent activement de manière individuelle et collective pour résoudre leurs problèmes, améliorer leurs pratiques agricoles et leurs revenus et saisir les opportunités qui se présentent.

Toutefois, ces initiatives passent souvent inaperçues ou se déroulent « in the social wild » (Sherwood et al., 2012). De multiples raisons expliquent pourquoi cette inventivité et capacité d’innovation (Leeuwis et al., 2014 ) sont souvent ignorées ou même délibérément rejetées par la communauté R&D formelle : la simple ignorance, ou les préjugés à l’encontre d’acteurs locaux souvent pauvres, sans pouvoir et sans éducation, le manque d’approches adaptées pour documenter l’innovation locale (voir cependant les propositions récentes de Salembier et Meynard, 2013), la prédominance d’une culture de l’intervention externe (voir ci-dessus) surtout dans les pays du Sud, l’absence d’incitations appropriées au sein des organisations R&D publiques, ou encore une ferme conviction de la supériorité des approches et technologies « modernes » et « scientifiques » pour résoudre les problèmes locaux et apporter des solutions externes, etc.

Des mesures simples pourraient néanmoins être prises pour tirer parti des dynamiques locales d’innovation et les renforcer. Tout d’abord, des diagnostics rigoureux de ces dynamiques pourraient être systématiquement encouragés au démarrage de toute intervention externe, en veillant à y associer les acteurs locaux eux-mêmes. Au-delà des diagnostics, les interventions R&D pourraient s’inspirer des processus d’innovation locale et les renforcer (Dolinska et d’Aquino, 2016 ; Waters-Bayer et al., 2015). Une approche hybride combinant les avantages de l’innovation locale et de l’innovation orchestrée augmenterait probablement les chances de réussite, d’institutionnalisation et de changement d’échelle : elle bénéficierait en effet d’un processus bien enraciné sur le plan social chez les partenaires locaux, plutôt que d’essayer d’en faire émerger un ex nihilo, ce qui est fréquemment une entreprise lente et incertaine (cf. les multiples échecs dans la création de groupes ou d’organisations paysannes ad hoc dans le cadre de projets). Enfin, un changement d’attitude concernant l’innovation locale chez nombres d’acteurs formels de la R&D serait sans doute aussi nécessaire ; cela leur permettrait de développer une appréciation informée et critique de l’innovation et des savoirs locaux.

5 Conclusions et perspectives

L’évaluation homogène et comparative d’une série d’études de cas réalisée dans le cadre du projet JOLISAA a permis de mieux comprendre la nature des processus d’innovation en agriculture familiale en Afrique. Les résultats obtenus confirment que de nombreuses et diverses initiatives d’innovation multi-acteurs ont été menées ces dernières années ou sont en cours dans les trois pays africains étudiés, un phénomène relevé par d’autres observateurs ailleurs en Afrique (Adekunle et al., 2012 ; Hounkonnou et al., 2012 ; Sanginga et al., 2009 ; Sanyang et al., 2014 ; Struik et al., 2014).

Beaucoup des innovations correspondantes sont mises en œuvre dans le cadre d’interventions de R&D pilotées et financées de l’extérieur, avec les divers avantages et restrictions qui les accompagnent. Bien qu’elles aient été plus difficiles à repérer et documenter, le projet JOLISAA a pu détecter et documenter différentes dynamiques locales d’innovation engagées par les agriculteurs et d’autres acteurs ruraux sans grand soutien des institutions formelles de R&D, ce que Waters-Bayer et al. (2015) ont documenté pour leur part à l’échelle mondiale. La nécessité de mieux documenter et appuyer ces initiatives et d’aider les acteurs locaux à renforcer leurs capacités d’innover figurent parmi les enseignements et recommandations cruciaux que le projet JOLISAA a tiré de ses travaux (Waters-Bayer et al., 2013).

En dépit des difficultés associées qui doivent être surmontées, de nombreux acteurs de la R&D agricole semblent être conscients de la nécessité d’une collaboration améliorée et plus étroite avec les agriculteurs et leurs organisations et entre eux. Une collaboration plus forte, équilibrée, large et active entre ces acteurs à différentes échelles, permettrait de mieux gérer les problèmes et enjeux complexes difficiles à aborder autrement, comme la production et la transformation durables, l’accès sûr et équitable aux (nouveaux) marchés, le changement climatique, la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté, entre autres.

Espérons donc que de nombreux chercheurs et professionnels de la R&D agricole seront disposés et capables de se préparer à affronter et surmonter le défi que représente l’utilisation d’une perspective systémique de l’innovation. Au-delà des forts besoins de formation correspondants (TAP, 2015), un premier pas consisterait à promouvoir et systématiser les échanges d’expériences et le travail en réseau sur l’innovation entre spécialistes de la R&D aux niveaux national et international.

Remerciements

Ce travail a été réalisé au titre du projet JOLISAA (www.jolisaa.net) dans le cadre du 7e programme-cadre de l’Union européenne (Grant Agreement : 245319). Les auteurs sont seuls responsables des opinions exprimées. Ils remercient les autres membres du consortium JOLISAA (J. van den Berg, B. Bridier, T. Crane, R. Mgonbo, T. N’gan’ga, N. Oudwater, G. Rootman, N. Selemna, J. Stevens, R. Tossou, et D.S. Vodouhe), ainsi que leurs nombreux partenaires au Bénin, au Kenya et en Afrique du Sud, pour les données et commentaires utiles sur les divers rapports et documents intermédiaires qui ont été utilisés pour élaborer le contenu de cet article. Nous remercions aussi chaleureusement les évaluateurs anonymes dont les suggestions et critiques pertinentes ont permis d’améliorer significativement la qualité de cet article.

Références

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Citation de l’article : Triomphe B, Floquet A, Letty B, Kamau G, Almekinders C, Waters-Bayer A. 2016. Mieux évaluer et accompagner l’innovation agricole en Afrique. Leçons d’une analyse transversale de 13 cas d’études. Cah. Agric. 25: 64003.

Liste des tableaux

Tableau 1

Cadre analytique inspiré du cadre SIA (Systèmes d’innovation agricole) utilisé pour l’évaluation des cas d’étude (version simplifiée).

Analytical framework inspired by the AIS framework (Agricultural Innovation Systems) used for case study assessment (simplified version).

Tableau 2

Liste des 13 cas d’étude ayant fait l’objet d’une évaluation participative dans le cadre du projet JOLISAA1.

List of the 13 case studies having been assessed in a participatory manner within the context of the JOLISAA project1.

Tableau 3

Caractéristiques clés de cas choisis d’innovation évalués en 2012 dans le cadre du projet JOLISAA en Afrique.

Key features of selected African innovation case studies assessed in 2012 within the framework of the JOLISAA project.

Tableau 4

Modalités et influence des interventions R&D sur le processus d’innovation dans différents cas d’étude JOLISAA.

Modalities and influence of external R&D interventions on the innovation process of selected JOLISAA case studies.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Séquençage des innovations techniques organisationnelles et institutionnelles dans le cas Prosopis sp. au Kenya.

Sequencing of technical, organisational and institutional innovation in the Prosopis sp. case in Kenya (Source : Chengole et al., 2014b).

Dans le texte

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