Open Access
Numéro
Cah. Agric.
Volume 25, Numéro 4, Juillet-Août 2016
Numéro d'article 45001
Nombre de pages 8
Section Études originales / Original Studies
DOI https://doi.org/10.1051/cagri/2016027
Publié en ligne 19 août 2016

© P. Thiebeau and S. Recous, Published by EDP Sciences, 2016

Licence Creative CommonsThis is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License CC-BY-NC (http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, excepted for commercial purposes, provided the original work is properly cited.

1 Introduction

L’atténuation du réchauffement climatique peut faire appel à un accroissement du stock de carbone organique des sols (MAAF, 2015) par une modification des pratiques culturales et un accroissement des restitutions aux sols des résidus végétaux après récolte. Dans ce contexte, la réduction ou la suppression du travail du sol sont des solutions préconisées pour favoriser le stockage de carbone dans les sols agricoles (Arrouays et al., 2002 ; Brunnert, 1996 ; Seguin et Soussana, 2006). Dans ces situations, les résidus de cultures sont maintenus à la surface du sol dans le cas du semis direct (SD) ou partiellement incorporés dans les premiers centimètres de sol en systèmes de techniques culturales simplifiées (TCS). La connaissance des biomasses végétales recyclées est une donnée d’entrée très importante des modèles de simulation des effets des modes d’occupation des sols et des pratiques agricoles sur l’évolution des stocks de carbone, mais aussi des modèles d’aide à la décision (ex. modèle de bilan humique  ; Andriulo et al., 1999). Ces entrées initiales de carbone sont déterminantes dans le renouvellement des matières organiques du sol (Neto et al., 2010), mais aussi pour la fourniture des nutriments, notamment de l’azote (Maltas et al., 2009). Leur répartition au sol peut être très hétérogène, selon les techniques mises en œuvre à la récolte et les conditions climatiques plus ou moins favorables à leur dispersion lors de la récolte, rendant difficile une estimation précise de leur quantité. L’estimation de ces quantités de résidus peut être envisagée de plusieurs façons. Dans le cadre de dispositifs expérimentaux, Oorst et al. (2007), Pascault et al. (2010) et Ringselle et al. (2014) ont utilisé des placettes délimitées par des cadres de 0,5 m× 0,5 m pour estimer la masse des résidus végétaux présents sur leurs dispositifs, en réalisant soit un transect perpendiculaire au sens du labour ou du travail du sol, soit des prélèvements aléatoires. Pour être représentatif de la culture étudiée, il suffit alors de moduler le nombre de placettes de prélèvement. Ainsi, Sinclair et Muchow (1999) estiment qu’une surface de prélèvement totale de 1 m2, prise en différents endroits d’une parcelle, est nécessaire pour estimer convenablement la biomasse présente d’une culture. Dans les situations évoquées ci-dessus, la surface totale de prélèvements a oscillé entre 3 et 6 m2, sur des parcelles expérimentales où les interventions culturales étaient maîtrisées par les expérimentateurs. Sur des parcelles d’agriculteurs, l’estimation précise des résidus est plus difficile en raison de l’application de techniques et de largeurs d’outils pouvant être très différentes selon les exploitations.

L’objectif de ce travail est de mettre au point une méthode d’estimation quantitative des résidus de cultures après la moisson, sur des situations agricoles contrastées. Cette méthode doit permettre de réaliser une estimation fiable de la quantité de résidus de récolte, tout en restant une méthode simple et rapide à mettre en œuvre, notamment par une personne seule.

2 Matériels et méthodes

Le travail est réalisé sur des exploitations de « grandes cultures » du Nord-Est de la France, où les espèces sont cultivées en culture pure. Les sept exploitations support de notre étude, réparties sur les départements de l’Aube (10) et de la Meuse (55), pratiquaient les TCS ou le SD depuis cinq à dix ans en 2009. Les cultures support de ce travail sont le blé, le maïs grain, l’orge de printemps, l’escourgeon, le pois protéagineux, le colza, la féverole et le tournesol, de 2009 à 2011. Ce choix de cultures nous permet d’avoir des quantités de résidus très différentes et de faire varier les conditions climatiques qui peuvent être contrastées lors des récoltes.

L’estimation des quantités de biomasses de résidus est déterminée dès la récolte des cultures. L’hétérogénéité de leur répartition au sol a été forte en 2009 et 2010 en raison de conditions pluviométriques et venteuses défavorables tout au long de la moisson, rendant plus difficile le broyage des pailles et accentuant la difficulté d’une répartition homogène par les dispositifs de broyage et de dispersion équipant les moissonneuses. Ces mauvaises conditions de récoltes ont été, en fait, une opportunité pour mettre au point un protocole robuste qui sera, a fortiori, applicable en bonnes conditions de récolte.

2.1 Positionnement des placettes de prélèvement à l’intérieur d’une parcelle

La méthode d’estimation repose sur :

  • une série de prélèvements de résidus sur une largeur de coupe de la moissonneuse, afin d’intégrer un transect de répartition par le broyeur de la moissonneuse, comme ont pu le faire Oorst et al. (2007) et Pascault et al. (2010) ;

  • une série de prélèvements en diagonale par rapport à ce transect, afin de prendre en compte la variabilité de répartition des résidus créée en cours de progression de la moissonneuse.

L’unité de surface de prélèvement est constituée d’un cadre de dimensions intérieures de 0,5 m× 0,5 m. Les prélèvements sont réalisés sur des surfaces délimitées par plusieurs cadres constituant des placettes de prélèvement, dont le nombre est fonction de la largeur de coupe de la moissonneuse utilisée sur chaque exploitation. Le test de différentes configurations d’espacements entre les cadres de prélèvement nous a permis de retenir la règle d’une placette de prélèvement par mètre linéaire de fauche, soit, dans nos conditions de travail :

  • cinq placettes pour 4,8 à 5,5 m de largeur de coupe ;

  • six placettes pour 5,8 à 6,5 m de largeur de coupe ;

  • sept placettes pour 6,8 à 7,5 m de largeur de coupe.

Nous ajustons ensuite la distance séparant chacun des cadres afin qu’elle soit identique. Chaque estimation de biomasse de résidus résulte donc de la moyenne de cinq à sept placettes, soit 1,25 à 1,75 m2 par transect. Celles-ci sont présentées avec une estimation de l’erreur associée, standardisée (SE), afin de pouvoir être comparées.

Pour réaliser l’estimation au champ, on se place à 50 m au minimum à l’intérieur des bordures du champ, ce qui élimine les zones de superpositions de pailles qui peuvent exister lorsque la moissonneuse réalise ses demi-tours. Ensuite, on identifie précisément une largeur de coupe de la machine grâce aux hauteurs d’éteules (chaumes) différentes entre deux passages. C’est à partir de ce repérage que l’on réalise le transect de prélèvement linéaire (Fig. 1A), perpendiculaire au sens de récolte. Enfin, c’est à partir de ce transect de prélèvement que l’on réalise le deuxième transect, en diagonale et indépendant du premier, en procédant de la sorte :

  • on déplace une placette d’extrémité d’un mètre par rapport à sa base, en respectant le sens de progression de la moissonneuse : cette nouvelle position devient la base de référence (Fig. 1B) ;

  • puis on déplace l’autre placette d’extrémité d’une distance correspondant à une largeur de fauche de la moissonneuse par rapport à la nouvelle base de référence, en respectant également le cheminement de récolte de la moissonneuse (Fig. 1C) ;

  • enfin, à l’aide d’un décamètre, on trace la diagonale qui passe par les angles extérieurs des cadres de chaque extrémité, puis on déporte chaque cadre de la ligne de prélèvement latérale contre celle de la diagonale ainsi tracée, tout en respectant la progression de la moissonneuse (Fig. 1D).

Nous avons testé l’hypothèse selon laquelle l’estimation obtenue est répétable sur un même champ. Pour cela, nous avons réalisé une seconde estimation (répétition 2, notée R2) en nous éloignant de 50 m au moins du premier lieu de prélèvement (répétition 1, notée R1).

thumbnail Fig. 1

Méthodologie d’estimation des biomasses de résidus au champ. A : réalisation du transect perpendiculaire ; B–D : trois étapes de réalisation du transect en diagonale.

Methodology of estimation of crop residues in the field. A: microplots along a perpendicular transect; B–D: three stages of design of the diagonal transect and microplots placement.

2.2 Prélèvements et traitements des échantillons

Sur chaque placette délimitée par un cadre, nous distinguons un échantillon A et un échantillon B :

  • l’échantillon A est constitué du paillis « propre », correspondant aux résidus de récolte que l’on peut ramasser à la surface du sol sans incorporer de terre. Cet échantillon comprend les éteules, coupées au ras de la surface du sol ;

  • l’échantillon B est constitué des particules de paillis en mélange avec du sol. Il s’agit, dans les situations explorées, de la menue paille (glumes et glumelles des épis) ainsi que des fractions de pailles très broyées : cet échantillon est collecté avec une griffe à six dents souples, qui respecte la rugosité de surface du sol (Currence et Lovely, 1970). Les rares adventices ou plantes de couverture présentes sont exclues de l’échantillon collecté.

Chaque échantillon collecté est placé en poche individuelle pour être traité au laboratoire dans sa totalité.

L’échantillon A est placé directement en étuve ventilée pour être séché durant 48 heures à 80 °C, puis pesé en sortie d’étuve pour l’estimation de sa masse sèche.

L’échantillon B subit une immersion dans un récipient d’eau afin de séparer le sol, qui sédimente, alors que les particules de paillis flottent à la surface de l’eau. Les particules de paillis sont récupérées par filtration à l’aide d’un tamis dont la maille est de 2 mm. Après un pressage manuel pour extraire l’eau de gravité, cette biomasse est séchée en étuve ventilée durant 96 heures à 80 °C, puis pesée pour l’estimation de sa masse sèche.

Le traitement des échantillons A et B permet de connaître la matière sèche totale (MST) de paillis présente à la surface du sol pour chaque placette de mesure.

2.3 Traitements statistiques des données

Toutes les données moyennes présentées sont accompagnées de leur erreur d’estimation standardisée, afin de pouvoir être comparées entre elles.

Les analyses de variances sont réalisées à l’aide du programme statistique de Sigma-Plot 12 (Systat Software, 2010) après validation du test de normalité (Shapiro-Wilk). Le classement en groupes homogènes est réalisé en employant le test de Newman et Keuls. Le niveau de signification retenu est p < 0,05. Les critères d’évaluation des ajustements linéaires sont l’erreur quadratique au modèle (RMSE) et le coefficient de détermination (R2).

3 Résultats

3.1 Variabilité spatiale de la biomasse de résidus et effet des pratiques de cultures sur la biomasse mesurée

Au cours des trois campagnes culturales, nous avons récolté à plusieurs reprises les mêmes espèces, dans des situations culturales proches (TCS ou SD). Nous observons une forte variabilité de la répartition des pailles au sol, derrière la moissonneuse, comme le montrent par exemple les données avec les résidus de pois (Fig. 2). Les mesures réalisées selon le protocole présenté, répétées trois fois de façon indépendante, montrent que les quantités de matière sèche (MS) mesurées sur chaque placette de prélèvement peuvent être très variables, tandis que la moyenne des six placettes (1,5 m2) constituant un transect de chaque répétition n’est pas différente : 209 ± 33, 216 ± 47, 211 ± 45 g MS/m2.

La prise en compte des résidus en contact avec le sol (échantillon B) évite de sous-estimer significativement la quantité totale de résidus présents au sol (Fig. 3). L’ajustement linéaire passant par ce nuage de point donne une pente de 0,94 et une constante de 255 g de MS, avec RMSE = 99 g MS et R2 = 0,8612 (p < 0,001). Cet ajustement est presque parallèle à la première bissectrice. En forçant la pente à celle de la bissectrice (valeur de 1), la valeur de la constante est alors de 225 g MS, avec RMSE = 100 g MS et R2 = 0,8583 (p < 0,001), ce qui dégrade peu la qualité de l’estimation obtenue précédemment. Dans cette hypothèse, la part de l’échantillon B représente près de 30 % de la MST de résidus au lieu de 34 % précédemment.

Par ailleurs, l’analyse des pratiques culturales mises en œuvre par chaque agriculteur (TCS ou SD) pour les trois campagnes culturales 2009, 2010 et 2011 ne permet pas de distinguer un effet année (p = 0,91), un effet des pratiques culturales (p = 0,36) ou une interaction année × pratique culturale (p = 0,75). Nous pouvons donc analyser les données collectées indépendamment des années culturales et des techniques mises en œuvre sur les exploitations support de ce travail. Cependant, nous maintenons une présentation des résultats faisant la distinction entre TCS et SD.

thumbnail Fig. 2

Exemple de variabilité spatiale observée sur un transect de la moissonneuse après une récolte de pois.

Example of the spatial variability of pea residues collected in six microplots along a transect perpendicular to the direction of harvest, with three replicated transects.

thumbnail Fig. 3

Comparaison des biomasses estimées avec et sans prise en compte des particules de résidus au contact du sol.

Comparison of the crop residue dry matters with and without taking into account the residue fraction in contact with the soil.

3.2 Robustesse de la méthode de prélèvement

Nous avons comparé les estimations quantitatives de résidus réalisées perpendiculairement au sens de la moisson, à celles réalisées en diagonale à la direction de récolte. Les données montrent (Fig. 4) que l’ensemble des valeurs se superposent à la première bissectrice. Leur ajustement linéaire offre une pente très proche de 1 (0,997) avec une constante de 8 g MS (RMSE = 72 g MS, R2 = 0,9370, p < 0,001). En forçant la constante pour qu’elle soit nulle, la pente calculée est de 1,006 (RMSE = 72 g MS, R2 = 0,9369, p < 0,001). L’analyse de variance ne détecte aucun effet année (p = 0,243), effet sens de collecte des résidus, perpendiculaire versus diagonale (p = 0,953), ou interaction entre ces deux facteurs (p = 0,980).

L’estimation de la répétabilité des mesures de MST de résidus, sur un même champ, par la réalisation d’une seconde mesure à 50 m d’intervalle, que ce soit par un transect perpendiculaire (Fig. 5A) ou un transect en diagonale (Fig. 5B) montre que les données se trouvent sur, ou très proches, de la première bissectrice. Avec le transect perpendiculaire, la RMSE est de 97 g MS pour un R2 supérieur à 0,89 ; tandis qu’avec le transect en diagonale, la RMSE est de −26 g MS pour un R2 supérieur à 0,90. Ces deux ajustements sont statistiquement hautement significatifs. Les résultats de l’analyse de variance ne montrent pas d’effet de l’estimation perpendiculaire (p = 0,808), ni d’effet répétition (p = 0,979), ni d’interaction mesure perpendiculaire × répétitions (p = 0,814). De même, nous ne décelons pas d’effet des mesures en diagonale (p = 0,589), ni d’effet répétitions (p = 0,996), ni d’interaction mesure en diagonale × répétitions (p = 0,740).

La prise en compte pour chaque emplacement d’estimation de la MST, d’un transect perpendiculaire et d’un transect en diagonale, caractérisant ainsi un double transect, permet d’améliorer l’estimation de MST initialement obtenue par l’un ou l’autre des transects. La répétition à 50 m d’intervalle (Fig. 5C) montre que l’on obtient une pente d’ajustement qui se superpose pratiquement à la première bissectrice, avec une constante de −4 g de MS. En forçant l’ajustement par l’origine afin d’annuler la constante, on ne détériore ni la RMSE = 81 g MS, ni le R2 > 0,93 qui reste hautement significatif (p < 0,001). On note l’absence d’effet système de culture (p = 0,693), d’effet répétitions (p = 0,987), et d’interaction système de culture × répétitions (p = 0,775).

thumbnail Fig. 4

Comparaison entre les matières sèches de résidus de récolte mesurée le long d’un transect réalisé perpendiculairement au trajet de la moissonneuse et celui réalisé diagonalement au sens de progression de la moissonneuse.

Comparison of the crop residue dry matters collected along transects realized perpendicularly or diagonally to the direction of harvesting.

thumbnail Fig. 5

Tests de robustesse de la méthode en comparant deux répétitions de transect réalisés à 50 m d’intervalle. A : pour la méthode de transect perpendiculaire ; B : pour la méthode de transect en diagonale ; C : pour la méthode utilisant le double transect.

Tests of robustness of the method, by comparing two transect replicates performed at 50-m interval. A: for the perpendicular transect method; B: for the diagonal transect method; C: for the combined transect method.

4 Discussion

Au cours des trois années d’expérimentation, les données obtenues ont montré que les cultures laissaient de 267 ± 23 à 1370 ± 140 g MS/m2 sur le sol, ce qui montre une forte variabilité des biomasses de résidus (soit 2,7 à 13,7 t/ha) à la récolte. La méthode proposée a bien capté l’hétérogénéité de répartition des résidus de récolte qui existe notamment en conditions de récolte défavorables. Si l’on retient une concentration moyenne en carbone (C) des tissus végétaux de 0,45 g C/g de biomasse, cela représente une quantité de carbone restitué au sol de 1,2 ± 0,1 à 6,2 ± 0,6 t C/ha dans les conditions expérimentales explorées, avec une erreur relative d’estimation de 8 à 10 %. Cette incertitude est faible si on la compare aux stocks de carbone des sols cultivés français, qui sont en moyenne de 30 t C/ha dans la couche 0–20 cm (Ademe, 2014 ; Ferchaud et al., 2015), et représente alors 0,3 à 2,0 % d’erreur relative.

En situation de non-labour, la majeure partie du paillis va se maintenir plusieurs mois au sol, ce qui aura une action sur les cycles du carbone (Neto et al., 2010), des éléments nutritifs (Naudin et al., 2011) et la dynamique de l’eau dans ces sols (Iqbal et al., 2015). Compte tenu de la sensibilité des modèles de carbone (C) des sols à la connaissance et la précision de ces quantités de résidus, cette méthode d’estimation permet d’améliorer la qualité des prédictions relatives aux modes de gestion ou d’utilisation des terres sur les bilans de carbone des sols.

Cette méthode a été conçue pour être mise en application par une personne seule. Elle montre que l’on obtient une bonne précision de l’estimation de la biomasse végétale restant au sol au champ, après une récolte, quel que soit le sens du transect : perpendiculaire au sens de la récolte ou en diagonale par rapport au sens de la récolte. Il est important de noter que, grâce à l’organisation spatiale de la collecte des échantillons, cette méthode peut être appliquée en un seul lieu du champ, sans répétition. La réalisation d’un double transect, constitué alors de 10 à 14 placettes pour nos situations (2,25–3,25 m2), affine la qualité d’estimation. Le double transect peut être envisagé dans les situations qui nécessitent moins de cinq placettes de prélèvement par transect, ce qui est le cas de petites exploitations familiales (matériel de récolte moins large, mieux adapté au parcellaire). En effet, réaliser un double transect de 10 à 14 placettes, seul, occupe deux à trois heures par situation. Le choix est donc à apprécier selon chaque opérateur.

Lors de la récolte des échantillons au champ, il est nécessaire de collecter la fraction de menue paille en contact avec le sol. En effet, nous avons constaté que cette fraction associée à la terre fine de surface représentait en moyenne près d’un tiers de la fraction totale. Cette fraction varie beaucoup d’un champ à un autre et d’une culture à une autre. Nous préconisons de réaliser cette mesure (échantillons A et B) pour toutes les situations étudiées.

Cette méthode d’estimation des résidus, aussi précise soit-elle, prend tout son sens sur une unité de sol homogène. Il est évident que le changement de nature de sol au sein d’une même parcelle, qui aurait pour incidence de modifier significativement la production de biomasse de la culture, impliquerait de réaliser une estimation de la biomasse au sein de cette zone. L’estimation de la quantité de résidus sur l’ensemble du champ sera donc à établir au prorata de la part qu’occupe chacune des natures de sols.

5 Conclusion

Ce travail permet de proposer une méthode standardisée et précise d’estimation de résidus de cultures présents sur le sol après une récolte. Cette estimation est réalisée à partir d’un ensemble de placettes positionnées sur un transect linéaire, réalisé perpendiculairement au sens de la récolte, ou diagonalement au sens de progression de la machine de récolte. La réalisation d’un double transect, intégrant les deux sens de prélèvement, augmente la précision d’estimation, mais se révèle également plus consommatrice de temps de travail. Vis-à-vis des objectifs d’adaptation des pratiques agricoles pour favoriser le stockage de carbone dans les sols, cette méthode, bien qu’étant « précise », permet de fournir une erreur d’estimation aux bilans réalisés. Enfin, cette méthode peut être appliquée à d’autres situations de culture, pour estimer des biomasses prairiales basses sur pied, des biomasses forestières au sol sous futaie, et/ou des biomasses pré-enfouies, en intégrant l’épaisseur de sol d’enfouissement (déchaumage).

Remerciements

Les auteurs remercient chaleureusement Monsieur Denis, de la coopérative Vivescia (Aube) pour ses conseils dans le choix des exploitations, mais aussi Messieurs Acker, Ferté, Gubelin, Lemey et Martens, exploitants agricoles qui ont accepté de mettre à notre disposition un peu de leur temps, et leurs champs, sans contrepartie, afin que nous puissions conduire cette étude. Nous remercions également A. Iqbal pour son aide lors de la collecte des échantillons au cours de l’été 2009. Enfin, nous remercions l’Agence nationale de la recherche (ANR) pour le soutien financier au projet PEPITES ANR-08-STRA-10 (Processus écologiques et processus d’innovations technique et social en agriculture de conservation).

Références

  • Ademe. 2014. Carbone organique des sols. L’énergie de l’agroécologie, une solution pour le climat, In: Eglin T, coord., Angers: Ademe Editions, 28p., ISBN: 978-2-358-38-447-6. [Google Scholar]
  • Andriulo A, Guerif J, Mary B. 1999. Modelling soil carbon dynamics with various cropping sequences on the rolling pampas. Agronomie 19 (5): 365– 377. [CrossRef] [EDP Sciences] [Google Scholar]
  • Arrouays D, Balesdents J, Germon J-C, Jayet P-A, Soussana J-F. 2002. Contribution à la lutte contre l’effet de serre. Stocker du carbone dans les sols agricoles en France ? Expertise scientifique collective, Synthèse, INRA, 32 p. [Google Scholar]
  • Brunnert H. 1996. The significance of agriculture and forestry for the global carbon cycle. How can they contribute to sequester increasing amounts of CO2 in the atmosphere. Berichte Uber Landwirtschaft 74 (1): 44– 65. [Google Scholar]
  • Currence HD, Lovely WG. 1970. The analysis of soil surface roughness. Trans. ASAE 13 (6): 710– 714. [CrossRef] [Google Scholar]
  • Ferchaud F, Vitte G, Mary B. 2015. Changes in soil carbon stocks under perennial and annual bioenergy crops. Glob. Chang. Biol. Bioenergy 8: 290– 306. [CrossRef] [Google Scholar]
  • Iqbal A, Aslam S, Alavoine G, Benoit P, Garnier P, Recous S. 2015. Rain regime and soil type affect the C and N dynamics in soil columns that are covered with mixed-species mulches. Plant Soil 393: 319– 334. [CrossRef] [Google Scholar]
  • MAAF. 2015. Contribution de l’agriculture à la lutte contre le changement climatique : Stéphane Le Foll annonce le lancement d’un projet de recherche international : le « 4 pour 1000 ». Communiqué de presse du 17 mars. Disponible sur http://agriculture.gouv.fr/contribution-de-lagriculture-la-lutte-contre-le-changement-climatique-lancement-dun-projet-de (dernière consultation le 14/04/2016). [Google Scholar]
  • Maltas A, Corbeels M, Scopel E, Wery J, da Silva FAM. 2009. Cover crop and nitrogen effects on maize productivity in no-tillage systems of the Brazilian cerrados. Agron. J. 101 (5): 1036– 1046. [CrossRef] [Google Scholar]
  • Naudin K, Scopel E, Andriamandroso ALH, et al. 2011. Trade-offs between biomass use and soil cover. The case of rice-based cropping systems in the lake Alaotra region of Madagascar. Exp. Agric. 48 (2): 194– 209. [Google Scholar]
  • Neto MS, Scopel E, Coorbeels M, et al. 2010. Soil carbon stocks under no-tillage mulch based cropping systems in the Brazilian cerrado: an on-farm synchronic assessment. Soil Tillage Res. 110 (1): 187– 195. [CrossRef] [Google Scholar]
  • Oorst K, Merckx R, Grehan E, Labreuche J, Nicolardot B. 2007. Determinants of annual fluxes of CO2 and N2O in long-term no-tillage and conventional tillage systems in northern France. Soil Tillage Res. 95: 133– 148. [CrossRef] [Google Scholar]
  • Pascault N, Nicolardot B, Bastian F, Thiébeau P, Ranjard L, Maron P-A. 2010. In situ dynamics and spatial heterogeneity of soil bacterial communities under different crop residue management. Environ. Microbiol. 60: 291– 303. [Google Scholar]
  • Ringselle B, Bergkvist G, Aronsson H, Andersson L. 2014. Under-grown-sown cover and post-harvest mowing as measures to control Elymus repens. Eur. Weed Res. Soc. 55: 309– 319. [Google Scholar]
  • Seguin B, Soussana J-F. 2006. Le réchauffement climatique (prédictions futures et observations récentes) en lien avec les émissions de GES. Fourrages 186: 139– 154. [Google Scholar]
  • Sinclair TH, Muchow RC. 1999. Radiation use efficiency. Adv. Agron. 65: 215– 265. [Google Scholar]
  • Systat Software. 2010. SigmaPolt 12. Disponible sur https://systatsoftware.com/products/sigmaplot/sigmaplot-details.php (dernière consultation le 14/04/2016). [Google Scholar]

Citation de l’article : Thiebeau P, Recous S. 2016. Une méthode pour quantifier les biomasses de résidus de récolte à la surface des sols après la moisson. Cah. Agric. 25: 45001.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Méthodologie d’estimation des biomasses de résidus au champ. A : réalisation du transect perpendiculaire ; B–D : trois étapes de réalisation du transect en diagonale.

Methodology of estimation of crop residues in the field. A: microplots along a perpendicular transect; B–D: three stages of design of the diagonal transect and microplots placement.

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

Exemple de variabilité spatiale observée sur un transect de la moissonneuse après une récolte de pois.

Example of the spatial variability of pea residues collected in six microplots along a transect perpendicular to the direction of harvest, with three replicated transects.

Dans le texte
thumbnail Fig. 3

Comparaison des biomasses estimées avec et sans prise en compte des particules de résidus au contact du sol.

Comparison of the crop residue dry matters with and without taking into account the residue fraction in contact with the soil.

Dans le texte
thumbnail Fig. 4

Comparaison entre les matières sèches de résidus de récolte mesurée le long d’un transect réalisé perpendiculairement au trajet de la moissonneuse et celui réalisé diagonalement au sens de progression de la moissonneuse.

Comparison of the crop residue dry matters collected along transects realized perpendicularly or diagonally to the direction of harvesting.

Dans le texte
thumbnail Fig. 5

Tests de robustesse de la méthode en comparant deux répétitions de transect réalisés à 50 m d’intervalle. A : pour la méthode de transect perpendiculaire ; B : pour la méthode de transect en diagonale ; C : pour la méthode utilisant le double transect.

Tests of robustness of the method, by comparing two transect replicates performed at 50-m interval. A: for the perpendicular transect method; B: for the diagonal transect method; C: for the combined transect method.

Dans le texte

Les statistiques affichées correspondent au cumul d'une part des vues des résumés de l'article et d'autre part des vues et téléchargements de l'article plein-texte (PDF, Full-HTML, ePub... selon les formats disponibles) sur la platefome Vision4Press.

Les statistiques sont disponibles avec un délai de 48 à 96 heures et sont mises à jour quotidiennement en semaine.

Le chargement des statistiques peut être long.